14.9.20

La finale des bisounours

 

Quand j’écrivais dans mon dernier post «que le moins mauvais gagne», je ne croyais pas si bien dire. J’aurais pu ajouter : «que le moins nerveux gagne». Dominic Thiem, perclus de crampes et tétanisé par l’enjeu, a donc remporté son premier titre du Grand Chelem au bout du suspense. Au bout du n’importe quoi même, tant cette fin de match a ressemblé à un immense sketch entre deux mecs incapables d’aligner deux coups gagnants de suite, enchaînant les fautes directes et complètement perdus dans leur tête, le tout dans un stade à huis clos qui sonnait aussi creux que la Pontaise un soir de novembre.

 «Moi, à mon bisounours, je lui fais des bisous,
Des gentils, des tout doux, des géants, des tout fous,
Un bisou sur la joue, un bisou dans le cou,
Car mon p’tit bisounours, il adore les bisous.»

Alors qu’il semblait totalement cramé, transpirant autant que Rafael Nadal dans un sauna et boitant entre les échanges, l’Autrichien a tout de même réussi à passer l’épaule, bien aidé par un Zverev qui tapait des revers dans le carré de service, qui envoyait des premières balles à 140 km/h et qui, dans ce jeu décisif aussi loufoque qu’irrespirable, a réussi à offrir deux affreuses doubles fautes à son adversaire. En termes de qualité de jeu, ce cinquième set n’était pas loin d’une rencontre d’interclubs de LNB entre Büsingen et Rapperswil.   

Alexander Zverev fera des cauchemars de cette finale pendant un moment, lui qui a mené 6-2 6-4 2-1, break en poche, face à un numéro 3 mondial fantomatique. L’Allemand au mental de majorette a encore servi pour le match à 5-3 au dernier set et a alors proposé aux cinquante personnes présentes dans le Arthur Ashe Stadium le jeu de service le plus dégueulasse de cette quinzaine : un coup droit dans les étoiles, un autre coup droit et un revers au milieu du filet, avant une pseudo attaque conclue par une volée absolument abjecte. Circulez, y’a plus rien à voir.

Voilà, on ne va pas faire dix mille théories sur cette parodie de match, mais juste constater que, même dans un stade à huis clos, ces finales de Grand Chelem restent toujours aussi crispantes et difficiles à aborder. Thiem est entré sur le court avec le trouillomètre à zéro, hanté par ses trois dernières finales de Majeur perdues, incapable de gérer son statut de favori. La merde qu’il a présentée durant les deux premières manches aurait sa place au Musée de l’Anatomie Morbide de New York. De son côté, l’outsider Zverev était plutôt tranquille au départ, a joué son jeu sans briller – mais avec sérieux – avant de se liquéfier totalement lorsqu’il s’est rendu compte qu’il pouvait le gagner, cet US Open 2020. On appelle ça la peur de gagner, le petit bras, Joël Gaspoz à Crans-Montana 87, la Nati à Cologne en 2006 ou Roger Federer le 14 juillet 2019. 

«Moi, à mon bisounours, je lui fais des bisous,
Et pour me dire merci, il m’en fait lui aussi,
Des gentils, des mimis, des grands et des petits,
Car mon p’tit bisounours, il adore les bisous

Bref, on ne retiendra que le nom du vainqueur et c’est donc Dominic Thiem. Bravo à lui quand même, qui mérite ce titre et qui a survolé le tournoi avant son craquage en finale. Celui qui aurait pu devenir le Andy Murray des années 2020 vainc enfin le signe indien et on compte sur lui, désormais, pour continuer sur sa lancée et confirmer qu’il fait bien partie de la race des grands champions en allant terrasser Nadal et Djokovic sur leurs terres. Soyons honnêtes : l’Autrichien est aujourdhui le meilleur allié de Roger Federer. Si le Maître espère conserver quelques-uns de ses records, il devra compter sur un énorme Thiem ces prochaines années. 

Allez les amis, merci pour vos commentaires et rendez-vous à Paris pour de nouvelles aventures masquées et covidées !

9.9.20

Une grande joie dans un océan de médiocrité

Je ne te le cache pas, alors que je mangeais un Rodizio avec trois amis – dont le pyromane et le colosse – autour d’un magnum de rouge et que j’ai reçu la nouvelle sur mon portable : «Novak Djokovic a été disqualifié de l’US Open», je suis presque tombé de ma chaise. J’ai tout de suite demandé à allumer la télé du resto et j’ai failli avaler ma picanha de travers quand j’ai vu ces images à peine croyables : cet âne de Djokovid, frustré et énervé après avoir raté trois balles de break, a réussi à allumer une juge de ligne en pleine tronche. Le comble dans tout ça, c’est bien sûr qu’on jouait dans un stade vide ! Et le stade, ce n’est pas le central du TC Cossonay, mais bien le Arthur Ashe Stadium et ses 22'500 sièges…

Bref, ce dadet aux allures de Joe Dalton avait quatre tribunes complètement vides pour balancer sa balle, il a préféré l’envoyer sur une juge de ligne qui – Dieu merci – s’en sort indemne et qui restera pour longtemps dans le cœur des supporters de Roger Federer et Rafael Nadal. Et dans le cœur de tous ceux qui détestent Djokonaze. Je sais, ça fait du monde, ça fait même 98,5% des habitants de la planète. Pas besoin de rajouter une couche sur cette immense faute professionnelle, sur cette connerie que même Nicolas Anelka et Nick Kyrgios réunis n’auraient pas réussi à concocter. Djokovic qui s’auto-élimine ainsi d’un Grand Chelem qui lui tendait les bras, c’est Dominique Strauss-Kahn qui tente de violer une femme de ménage à quelques mois de la présidentielle. C’est à la fois irréel et tellement jouissif. Dieux du tennis 1 – bêtise de Djokobite 0.

Du coup, dans ce tournoi qui ne donne aucun, mais alors absolument AUCUN rêve, il y aura un nouveau lauréat en Majeur, ce qui reste un petit événement dans le monde de la petite balle jaune. Un vainqueur qui sera, quel que soit son nom, à l’image de cet US Open 2020 : sans grand charisme, sans panache et à oublier au plus vite. Reste qu’il serait con pour les Zverev, Medvedev, Thiem et autre Rublev (tcheu ce casting, on dirait le All-Star Game de lAdria Tour) de ne pas tenter le coup et de s’offrir un bon Grand Chelem au rabais. Au rayon liquidation de chez Maxi Bazar même, n’ayons pas peur des mots. Ce tournoi, c’est comme lorsque tu vas à la Coop à 17h45 un samedi et que tu finis par acheter un produit avec 75% de réduction. T’as un peu honte mais tu le bouffes quand même devant ta télé le soir même. 

Dominic Thiem, l’homme aux trois finales de Grand Chelem perdues, mériterait de conjurer le sort et de soulever enfin un grand titre, lui qui a aussi craqué en finale du Masters l’an dernier. Et on se dit qu’un Thiem délesté de cette pression et bourré de confiance pourrait peut-être, dans un très grand jour, faire tomber l’ogre de Manacor en finale de Roland… On verra tout ça. Enfin, on verra, c’est un grand mot car à l’heure actuelle, le seul échange du tournoi que j’ai suivi, c’est celui – unilatéral – entre le numéro 1 mondial et cette pauvre juge de ligne. Et autant dire que je ne suis pas sûr d’allumer ma télévision pour regarder un crouille Zverev – Thiem en finale, le tout dans un stade à huis clos…

Bref, que le moins mauvais gagne et qu’on en finisse vite avec cette mascarade, avec ce doigt d’honneur au tennis et au spectacle. Cet US Open 2020 est une imposture, un véritable non-sens, que les organisateurs auraient mieux fait d’annuler. Comme ils feraient bien d’annuler Roland Garros. Putain, comme le «monde d’avant» me manque les amis.