13.10.20

20-20

Tcheu comme je n’ai pas envie d’écrire ce post. Le truc chiant et ô combien désagréable que tu aurais souhaité ne jamais te coltiner. Comme ta première panne au lit, ta mère qui te surprend en train de te branler sous la douche à 14 ans, ton rendez-vous chez le dentiste pour te faire arracher les quatre dents de sagesse, le soir où tu as fini aux urgences après t’être fracassé le nez contre un mur en vomissant, ou encore les rencontres durant lesquelles Roger Federer a raté des balles de match contre Djokovic en Grand Chelem (je sais, il y en a trop). 
 
Bref, ce post qui annonce que Nadal est désormais à la hauteur de Federer fait mal aux yeux, mal au bide, mal au cœur. Surtout quand on pense que le Bâlois menait encore 16-6 après son triomphe en Australie en janvier 2010… Oui oui, tu sais aussi bien compter que moi : depuis cette date, son meilleur ennemi lui a infligé un abject 4-14 dans les dents. Si Federer est clairement le Maître des années 2000, il s’est ensuite fait bouffer par ses deux principaux rivaux dans les années 2010, sachant que Djokovid en a remporté 16 pendant ce laps de temps, dont quatre finales au goût très amer contre le Suisse.
 
L’histoire du tennis retiendra qu’il y a eu 20-19 en 2019 – après le sacre de Popeye à l’US Open – et qu’il y a désormais 20-20 en 2020. Si la logique est respectée, il y aura 20-21 en 2021, lorsque l’ogre de Manacor aura remporté pour la quatorzième fois son tournoi de la Porte dAuteuil, le tout en se présentant à la conférence de presse d’avant-tournoi dans la peau d’un outsider et en arguant que «non, ça sera très dur de gagner cette année, avec ces balles lourdes et ces conditions de jeu difficiles». Mais oui Rafa, mais oui. Robocop me fait penser à Guy Roux lorsqu’il brillait à la tête de l’AJ Auxerre, faisait trembler certains clubs européens et finissait chaque fois dans le top 3 du championnat de France, tout en déclarant à chaque début de saison que «l’objectif reste le maintien». Bref, Rafael Nadal aime quand même bien nous prendre pour des cons. 
 
Comme redouté, Dark Vador a donc soulevé sa treizième (!) Coupe des Mousquetaires dans le ciel de Paris. A l’image du parcours de Rambo, la finale a ressemblé à une corrida où un matador bourré de testostérones et de tocs a mis à mort une pauvre brebis égarée. Un triste et pâle Djokobite, dépassé par les événements et par le jeu stratosphérique déployé par son bourreau. On en vient presque à regretter que Terminator ait un peu lâché du lest au troisième set et qu’il n’ait pas pu se venger complètement du 6-3 6-2 6-3 ramassé le 26 janvier 2019 en finale de l’Open d’Australie. Quitte à se faire humilier, j’aurais apprécié que ce numéro un mondial décrié et détesté par beaucoup, voire tous, lequel a encore joué au malade imaginaire en quart de finale contre Carreño, prenne une vraie rouste, une vraie correction, une vraie Bayern – Barça, genre un 6-0 6-2 6-1 qui l’aurait hanté pendant très longtemps. 
 
Que dire d’autre sur Rafael Nadal et sur cette finale ? Rien. Les journaux du monde entier se sont chargés d’encenser le Hulk des Baléares, même Rodgeur s’est fendu d’une publication élogieuse, je ne vais pas rajouter une couche à cette branlette collective. Je relèverai juste qu’on vit bel et bien une année 2020 affreusement cauchemardesque, horriblement dégueulasse, marquée par ces annulations d’événements en série, cette parano internationale, ces confinements, ces quarantaines, ces masques, ces checks de coude, ces faillites, ces boîtes de nuit fermées, ces stades vides, ces cotons-tiges dans le nez, ces pertes d’odorat et ces cons qui t’engueulent dans la rue parce que tu n’as pas éternué dans ton bras. Ce 20-20 entre Federer et Nadal est donc l’infâme cerise sur ce gâteau à la merde et au Covid.
 
Voilà les amis, je ne conclurai pas ce post en revenant sur ce Roland Garros irréel, comme l’a écrit un lecteur dans les commentaires. Oui, un Roland Garros irréel avec un tournoi féminin qui a vu une gamine de 19 ans remporter le tout premier titre de sa carrière (!) dans un Grand Chelem (si si, le tennis féminin est un sketch), des matches disputés dans des conditions ubuesques, un vent digne du Creux du Van et un froid qu’on ressentait jusque dans notre salon, avec en point d’orgue ce «fameux» Nadal – Sinner en very night session. On avait aussi l’impression de jouer de nuit alors qu’il faisait jour, avec cet immense toit qui, lorsqu’il est fermé, offre des perspectives et une ambiance totalement différentes. Je me réjouis de voir un match dans un Philippe Chatrier fermé et plein à craquer. Ça sera peut-être en 2022. Ou pas. Ou jamais. 
 
Enfin, on retiendra aussi les quelques tops et flops de la quinzaine : un Gaston sorti de nulle part, un Sinner prometteur, un Schwartzman déroutant, un Tsitsipás encourageant, un Thiem usé et un Wawrinka pas encore au top physiquement (rien d’étonnant quand tu vois l’été qu’il a passé sur les plages de Cannes…). Hugo Gaston mis à part, on n’oubliera pas de railler une fois de plus le naufrage du tennis français tandis qu’on terminera cet article sur une note positive : la finale 100% helvétique chez les juniors entre Dominic Stricker et Leandro Riedi qui s’est soldée par la victoire du premier nommé. Bref, bravo à lui et merci à tous pour vos commentaires ! On se revoit je-ne-sais-pas-quand et d’ici là, on essaie de garder le moral.