27.1.19

L'Humiliation avec un grand H

6-3 6-2 6-3. Non, ce n'est pas le score d'un premier tour entre une tête de série et un qualifié, mais bien le score de la finale de l'Open d'Australie 2019 entre le numéro 1 et le numéro 2 mondial. Une baffe, une raclée, une branlée, une fessée, un uppercut, un PSG – Guingamp, un Allemagne – Brésil, un black qui encule une naine, bref, une Humiliation historique. Avec un gros H comme Honte, Homicide, Hardcore et «Hey les crevettes à l'ail, ça fait moins les malins aujourd'hui ?»

Dimanche soir, il n'y a pas eu de match sur la Rod Laver Arena entre le grand Novak Djokovic et le petit Rafael Nadal. Le maître et l'élève. Le professeur et l'étudiant. Le papa et le gamin. Rocco Siffredi et ton pote vietnamien à la micro-bite. A l'image de sa demi-finale, le coton-tige a marché sur l'eau et a fait tout juste, mais alors tout, du premier au dernier point. Une statistique, une seule, pour résumer le degré de perfection atteint par le désormais septuple vainqueur du tournoi : le Serbe a commis 14 fautes directes en demi et en finale. Oui oui tu as bien lu, 14 fautes en deux matches, soit 5 contre Pouille et 9 contre Nadal... A ce niveau-là, ce n'est plus du tennis, c'est de la Playstation !

Une impressionnante démonstration de force qui fera date et qui laissera probablement des traces. J'en suis resté à la fois bouche bée et sur ma faim. Bouché bée devant la facilité de la machine de Belgrade. Sur ma faim car j'espérais un tout autre match entre ces deux monstres, genre un remake de Melbourne 2012 ou Wimbledon 2018, il n'en fut rien. Ce court de tennis était en ring de boxe, ce Nadal-là n'était qu'un vulgaire sparring-partner, un essuie-glace à peine capable de lui renvoyer quelques balles. Cette finale n'a donc pas sauvé une édition 2019 de petite facture, où les beaux matches n'ont pas été légions, où les night sessions ont manqué de panache et où ce super tie-break ne m'a pas convaincu. Personnellement, j'ai toujours aimé ces matches de dingue avec des 18-16 ou 26-24 au cinquième set. Sans parler du cultissime 70-68 entre Isner et Mahut... Force est de constater que ces scénarios de fou ont manqué cette année à Melbourne.

Bref, Djokoboss était trop fort, mille fois trop fort pour un Popeye qui a subi ce qu'il fait généralement subir à ses proies en finale de Roland Garros. La Momie n'avait jamais pris une telle raclée en finale de Grand Chelem et, à vrai dire, je l'ai rarement vu aussi perdu sur un court. La bonne nouvelle pour tous les fans de Rodgeur, c'est évidemment que Musclor reste bloqué à 17 Majeurs et, si le Serbe continue comme ça cette saison, l'Espagnol ne pourra compter que sur son traditionnel sacre à la Porte d'Auteuil pour rattraper son retard. Et encore, rien ne dit que le sosie de Joe Dalton ne gagne pas cette année à Paris. Si la finale devait à nouveau les opposer, je miserais bien une pièce sur une victoire de Djokobite.

Un Djokobite qui entre encore un peu plus dans l'histoire de son sport, dépassant Pete Sampras dans le record des records, celui des titres en Grand Chelem. Le record qui désignera, lorsque les trois monstres de la petite balle jaune auront rangé leur raquette, le plus grand joueur de tous les temps. A 31 ans, fort de ses 15 couronnes majeures, le natif de Belgrade a encore de belles années devant lui et se profile, selon moi, comme le plus grand danger pour Federer. Le mec est affamé, injouable, plus fort que jamais. Oui, il me fait très peur. Je suis même en train de me dire que ce Djokovic-là est meilleur que celui de 2011, tu sais, celui qui avait fini la saison avec un ratio de 70 victoires pour 6 défaites. J'espère évidemment me tromper. J'espère aussi et surtout qu'un joueur de la Next Gen pourra se mêler à la bagarre et gagner un Majeur cette année. A l'heure où j'écris ces quelques lignes, on en est très loin.

Allez les gars, merci pour vos commentaires et pour votre passion, vous faites vraiment plaisir. A très vite pour de nouvelles aventures !

20.1.19

Anderson, Millman, Tsitsipas : copier / coller

 
J’aurais pu utiliser le même titre qu’en septembre dernier après le traumatisme new-yorkais : Rodgeur n’est plus un tueur. Comme face à Anderson à Wimbledon et Millman à l'US Open, le Maître n’a su tuer ce match quand il en avait les occasions et laisse filer une rencontre qui était largement à sa portée. Les regrets sont immenses, surtout quand on pense à ce deuxième set où le Bâlois a galvaudé huit (!) balles de break, dont quatre sur des balles de set. A en devenir fou, à vouloir balancer sa télé par le balcon et à dégueuler ton houmous de la veille.

La suite, on la connaît, on la sentait d’ailleurs en voyant Rodgeur afficher sa tête des mauvais jours à partir du tie-break de la deuxième manche. Sa tête des mauvais jours qu’on déteste et qui symbolise parfaitement son état d’esprit quand il est dans un jour sans : frustration, impuissance, énervement. Il y avait un peu de tout ça cette nuit sur la Rod Laver Arena. Frustration de ne convertir aucune de ses douze balles de break, impuissance face aux coups de canon du Grec, énervement contre son jeu et surtout contre son coup droit, lequel l'a complètement trahi (40 erreurs directes, 40 !) en ce dimanche de triste facture.

Résultat des courses, on est comme des supporters de Guingamp aujourd’hui : le cul tout rouge après avoir pris une méchante fessée. Cet Open d’Australie est déjà fini pour les Suisses et la deuxième semaine n’a même pas encore commencé... Sors de ce corps, tennis français. Pourtant, autant Stan que Rodg semblaient affûtés, frais, motivés, capables d’aller loin dans ce tournoi. Ils prennent la porte dans des circonstances quasiment identiques, en ayant mal négocié deux-trois points et en étant tombé sur des os. A un jeu et quelques minutes près, leurs défaites sont des soeurs jumelles. Quelles salopes.

Reste à saluer la magnifique prestation de Stefanos Tsitsipas, l’un des joueurs les plus prometteurs de cette fameuse Next Gen. Le grand pin de Athènes signe le plus beau succès de sa carrière et n’a rien volé aujourd’hui. «Je suis l’homme le plus heureux sur terre» a-t-il dit au micro de John McEnroe. Qu’il en profite et qu’il ne lâche rien. Et s’il peut continuer comme ça et battre deux Espagnols coup sur coup, ben je te promets d’écrire un post en grec ancien et de prendre une cuite à l’Ouzo !

Bref, putain de dimanche de merde. Tout ce qu'il nous reste pour vibrer un peu en allumant la télé est d’espérer que Nadal ne gagne pas son 18ème Majeur et, accessoirement, espérer une autre finale qu’un énième Djokovic - Nadal. Perso, je signe les yeux fermés pour un Zverev - Tsitsipas, voire même un Coric - Bautista Agut. Je prends même un Pouille - Tiafoe avec plaisir. Désolé les mecs, je ne suis pas drôle aujourd'hui, ça fait quand même mal de se faire prendre par un Grec. À sec, par derrière et par surprise.

15.1.19

Putain Andy, tu vas quand même nous manquer

Non, ce n'est pas le joueur le plus élégant, ni le plus romantique. Ce n'est pas non plus le mec le plus sympathique ni le plus souriant, et sa tronche d'éternel grincheux nous a souvent agacé. Comme sa mère Judy, celle qu'on aurait bien empoisonné à coups de somnifères, le sosie de Frankenstein est une vraie tête à claques. Son jeu est insipide, manque de folie et ses nombreuses défaites face à Djokobite nous ont parfois rendu fous, notamment en finale de l'Open d'Australie où l'Ecossais a perdu un record de cinq finales (!), dont quatre face au sosie de Joe Dalton. Bref, on aimait le détester et l'insulter, comme lors de ce huitième de finale stratosphérique à Wimbledon contre notre Stan national en 2009. Mais putain, il va quand même nous manquer, ce con.

Oui, il va nous manquer et il va manquer au monde du tennis, tout simplement. Parce que, derrière tous ses défauts, se cachaient un homme au grand coeur, un combattant hors norme et un beau champion. Un hargneux, un gueulard qui aura réussi quelques coups d'éclat et dont le bilan force le respect avec trois titres en Grand Chelem (pour huit finales perdues...), quatorze Masters 1000, une Coupe Davis, un Masters, deux médailles d'or aux Jeux Olympiques et une place de numéro 1 mondial qu'il paie aujourd'hui au prix fort. Bien sûr, son palmarès aurait pu être autrement plus impressionnant si sa carrière n'avait pas croisé celle de Federer, Nadal et Djokovic au faîte de leur gloire. Mais bon, cette théorie à deux balles est également valable pour ces trois-là. Et comme on dit, avec des «si» je serais un vegan de gauche, prof de yoga et membre de l'église évangélique de Plainpalais.

Ainsi donc, celui qui a ressuscité le tennis britannique et fut le digne successeur de Fred Perry a annoncé sa retraite cette semaine, lors d'une conférence de presse bouleversante. S'en est suivi son dernier match sur le circuit face à Bautista Agut où l'ex-protégé d'Ivan Lendl, fidèle à lui-même, a livré un combat homérique, se battant comme un dératé pour gratter quelques jeux, quelques minutes d'adrénaline supplémentaires sur le court et ne lâchant prise qu'au cinquième set, sous les vivats d'un public complètement acquis à sa cause lui ayant réservé un accueil triomphal, sans parler de l'hystérie collective qui a régné dans le stade après sa victoire dans les troisième et quatrième sets. C'était beau, fort, émouvant, puissant. Cette dernière avait de la gueule, et ça fait quand même vraiment chier de l'écrire. Une dernière qui aurait clairement mérité les honneurs et les projecteurs de la Rod Laver Arena, mais il ne faut pas demander aux Australiens de trop réfléchir.

Reste une toute petite chance de le revoir encore à Wimbledon cet été, pour un ultime tour de piste et un hommage à la hauteur de sa carrière, sur le Central cette fois, car les Anglais, eux, sauront mettre leur cerveau sur «on». On espère sincèrement le retrouver sur le gazon du All England Club en juin et, si ce n'est pas le cas, si sa hanche ne tient pas le coup, eh bien au revoir et merci Andy. Sans toi, il n'y aurait jamais eu de Big Four, jamais eu 15'000 personnes pour un match de Coupe Davis
à Glasgow, jamais eu autant de larmes – de joie ou de tristesse – à Church Road. Sans toi, Wimbledon serait resté une citadelle imprenable et une immense frustration pour toute une nation, à l'image de Roland Garros pour les Français. Sans toi, ta mère serait restée une conne. Grâce à toi, elle est devenue une conne célèbre. 

Tu as moins de talent et de charisme que Federer ou Nadal, mais une volonté et un mental à toute épreuve. Tu as 31 ans aujourd'hui et tu prends déjà ta retraite. Putain de hanche en carton, putain de destin. Allez Andy, la bière aura peut-être meilleur goût désormais, et tu pourras surtout en boire sans te soucier du lendemain. Je lève la mienne à ta santé, à ta carrière et à la suite de ta vie, vieux grincheux !

7.1.19

Premiers frissons de 2019

Un samedi quelconque de janvier, en training dans mon appart, les stores baissés, le cendrier plein, le frigo vide, beau vaseux de la veille, cinq cafés et trois clopes dans le gosier, un bon vieux commentaire de Pierre-Alain Dupuis depuis sa cabine à Genève : le tableau ne faisait pas rêver, et pourtant j’ai fini debout dans mon salon, le poing brandi après la balle de match remportée par les Benderer ! On appelle ça la magie du sport, la passion du tennis, l’amour de Roger Federer.

Eh oui, comme toi peut-être, j’ai vibré pour cette Hopman Cup (enfin, n’exagérons quand même pas), j’ai vibré pour la finale de cette Hopman Cup et, surtout, pour ces deux derniers points. Cette balle de match sauvée par le Maitre avant ce «deciding point» complètement fou, où Belinda et Rodgeur se sont mués en muraille derrière le filet. Ça reste un tournoi exhibition où certains joueurs semblent prolonger leurs vacances, mais c’était beau de voir cette gamine de 21 ans sauter dans les bras du plus grand joueur de tous les temps. Un bonheur simple et sincère, comme lorsqu'un agriculteur de Picardie nous raconte sa love story dans L'Amour est dans le pré un lundi soir sur M6.

L’année commence donc parfaitement bien pour le tennis helvétique en général et pour notre Rodgeur national en particulier. Le Bâlois a paru très en jambes à Perth, gagnant tous ses matches avec autorité et panache, notamment celui face à Alexander Zverev en finale. De bon augure pour cet Open d’Australie où le double tenant du titre sera évidemment très attendu. Autant le dire tout de suite, signer le triplé serait un immense exploit et une assez grosse surprise. Comme en 2018, il faudra un alignement des étoiles quasi parfait : un tirage au sort abordable, des matchs en night-session et quelques couacs chez les favoris. Enfin, chez Popeye et Djokobite surtout.

De son côté, Wawrinka semble attaquer cette saison 2019 avec plus de certitudes qu'en 2018, ce qui n'est pas difficile. Le Vaudois a passé deux tours à Doha avant de craquer contre le futur vainqueur. C'est désormais à l'Open d'Australie, où Stanislas est devenu Stan The Man un dimanche de grâce de janvier 2014, qu'on espère le revoir retrouver les sommets et tutoyer les étoiles. Il faudra bien sûr compter sur un coup de pouce du destin puisque l'homme aux trois tournois du Grand Chelem ne sera pas classé tête de série. Et au pire, s'il chope Djokovic au premier tour, soyons assez fous pour croire à l'exploit !

Enfin, un dernier paragraphe pour répondre à la question de Thierry Fangio dans les commentaires, pas grand-chose à dire sur la phrase de Rodgeur qui a fait frémir la planète tennis. Voilà les amis, le jour tant redouté où le Maître va annoncer sa retraire va bien finir par arriver. Perso, je le vois encore jouer jusqu'en... 2021, l'année de ses 40 ans. Après, tout dépendra de sa condition physique... Mais s'il est encore frais dans sa tête et dans son corps, il pourrait bien nous offrir une ou deux saisons de bonus après ses 40 piges. Il en est capable et, le connaissant, je suis sûr qu'il en a envie. Chiche !