14.7.19

La pire défaite de tous les temps

  
Je te préviens, il n'y aura rien de bon dans ce post. Rien. Passe ta route si tu n'as pas envie de repenser à ce match, à ce film d'horreur, à ce cauchemar, à ce coup de poignard dans le cœur, à cette tragédie nationale. J'écris ce papier comme on remplit sa déclaration d'impôts, comme on se torche le cul ou comme on signe une convention de divorce : parce qu'on doit le faire, tout simplement. C'est un désastre. Un Désastre. C'est la pire défaite de la carrière de Roger Federer. Pire qu'en 2008 contre Nadal, pire que tout. La pire défaite de tous les temps, tous sports confondus. Oui, c'est la pire déception sportive de toute ma vie. J'ai beau chercher, je n'en vois pas d'autre. Rien n'a été aussi traumatisant, aussi frustrant et aussi triste que cette finale-là.

Non Rodgeur, NON !!! T'avais pas le droit. T'avais pas le droit de la perdre. Pas comme ça. Pas chez toi à Wimbledon. Pas contre ce putain de Djokobite. NON NON NON. T'avais pas le droit de nous faire ça mais, surtout, t'avais pas le droit d'infliger ça à ta légende. A la limite, j'aurais préféré que tu prennes un trois sets à zéro et qu'on passe directement à autre chose. Mais là, comment passer à autre chose ? Comment oublier ces deux balles de match à 8-7, comment oublier ces deux balles de break – qui avaient le poids de balles de match – à 11-11 ? On n'oubliera pas, on n'oubliera jamais. Jamais. Putain de merde, un ace, un service gagnant ou un coup droit sur la ligne, c'est tout ce que tu avais à faire pour entrer à nouveau dans l'Histoire et remporter l'un des plus beaux matchs de ta vie. Si ce n'est le plus beau.

Je sais, ça ne sert à rien de refaire ce match. Je l'ai déjà refait mille fois dans ma tête. J'y repenserai encore dix mille fois cette semaine. Mais ça ne sert à rien. L'Histoire est écrite, le chapitre est clos et c'est Novak Djokovic qui en est le héros. Ce joueur au charisme d'un tube de Cenovis (je sais, c'est méchant pour le tube de Cenovis) a sauvé deux balles de match, avant de sauver deux balles de break dans un avant-dernier jeu capital. Oui, ce mec est un robot, un tueur, une machine. Tout ce que n'est pas Federer. Notre bon vieux Rodgeur a des émotions, des sentiments, comme toi et moi, et il a tremblé au moment de conclure. Mes amis de CartonRouge.ch – que je salue au passage – l'ont surnommé Jean-Claude Dusse, l'homme qui n'arrive pas à conclure dans Les Bronzés font du ski. C'est sévère, mais il y avait un peu, voire beaucoup, de Jean-Claude Dusse chez Roger Federer dimanche après-midi.

Un point. Un point.
Un point. Un point. Un point. Un point. UN POINT. Il aura donc manqué un point. Un point, soit même pas 1 centimètre. Voilà ce qui sépare aujourd'hui un homme et tous ses fans d'une déprime absolue à une extase fantasmagorique. Je n'y reviens pas. Je n'y crois pas. Le destin est tragique, terriblement cruel. Je ne vais pas partir dans de longues théories sur cette rencontre, ça ne sert à rien. Je sais, je me répète, et j'en ai rien à foutre. Un match que Jean-Claude Federer aurait pu gagner en trois sets, qu'il aurait dû gagner en quatre, et qu'il a réussi à perdre en cinq. Roger Dusse a gagné 218 points dimanche, Djokovic 204. C'est comme quand Hillary Clinton a perdu contre Donald Trump avec 3 millions de voix en plus. C'est comme le Portugal contre la Grèce en finale de l’Euro 2004, lorsque les stats devaient afficher 22 tirs à 1. C'est comme ton pote qui charogne la même miss depuis 10 ans et qui finit par se la faire piquer par son contrôleur fiscal. Qu'on le veuille ou non, c'est la lose.

C'est la lose et c'est moche. C'est moche de perdre comme ça. Et ça me saoule, ça me gave, ça m'énerve. Je n'ai plus envie d'écrire un mot sur cette horrible défaite. Alors je te dis à bientôt, à je ne sais pas quand. La tournée américaine ne va pas me passionner, c'est certain. Tu me reverras pour l'US Open mais, si Jean-Claude Dusse est en finale contre Djokoboss, je te promets que je ne la regarderai pas, cette daube sans nom. Une chose est sûre, il y aura un avant et un après 14 juillet 2019 dans le monde du tennis. C'est un tournant dans l'histoire de ce sport. Il y a des choses qu'on ne peut plus revivre. Il y a des instants de gloire qu'on laisse passer à tout jamais. Il y a des moments de légende qu'il faut savoir saisir. Il y a des regrets éternels. Ce 14 juillet 2019 est un regret éternel. ETERNEL. Un point. Putain. Un point. 


Adieu rêves et records. Adieu champagne et cotillons. A nous mouchoirs et colère. A nous tristesse et détresse. Un point les amis. Un point. 

13.7.19

À faire bander un mort !

Mais oui Rodgeur, mais ouiiiiiiiiiiiii !!!!! Mon Dieu, pardon, mon Federer comme elle fait du bien cette victoire, mon Federer comme elle nous redonne le sourire et nous fait oublier ce gazon indigne, ce début d’année merdique et, plus près de nous, ce Roland Garros grotesque. Ce n’est qu’une demi-finale, rien n’est fait et on sait très bien que Djokobite reste un traumatisme pour nous en finale de Grand Chelem (j’y reviendrai) mais là il faut juste savourer. Savourer ce match 5 étoiles, savourer ce retour éblouissant du Maître, savourer cette victoire contre ce Popeye sans grand fair-play, lui qui a mis une plombe pour changer son bandage à 5-4 au quatrième set, service à suivre Federer, histoire de tenter un énième coup de poker... C’était faible, petit et indigne de sa personne, c’était Sergio Ramos qui prend un deuxième jaune volontaire pour être suspendu au match retour.

En état de grâce et en mode attaque, le Maître nous a offert un véritable récital et une 101ème victoire éclatante dans son jardin, record absolu en Majeur. Son plus beau match – et de très loin – de sa saison, voire des deux dernières années. Impérial au service, impressionnant en revers, agressif en coup droit, solide dans la tête (oh que oui), l’homme aux vingt Majeurs et huit Wimbledon a épaté la galerie ce vendredi, comme à sa grande époque. Sa joie était belle, sincère, touchante. Celle de son clan aussi. Et tout ça à quelques jours de ses 38 ans... Il n’y a plus de mots, il n’y a que du respect. Un immense respect et une érection aussi grande que le nombre de victoires de notre Rodgeur national (101, putain 101 !) dans son théâtre des rêves.

La fin du match restera dans les annales. Comme à Melbourne en 2017, les deux monstres du tennis ont décidé de nous offrir deux derniers jeux de dingue, longs de 20 minutes, à couper le souffle, à arrêter le temps, avec notamment cette balle de débreak à 30-40 complémentent folle, ces troisième et quatrième balles de match sauvées par un Rambo en mode guerrier, le tout avant ce dénouement puissant, fort, merveilleux, sur cette cinquième balle de match, cette cinquième balle de finale. J’étais debout, franc fou, hystérique, tellement heureux !! C’est un énorme, un gigantesque Rodgeur qui est allé chercher cette victoire avec ses couilles, ses tripes, son talent. De ses 101 victoires à Church Road, celle-ci
comme il l’a relevé en conférence de presse aura une place à part dans son coeur, dans le top 5 des succès de prestige à Wimbledon, tant pour le style que pour le symbole.

Voilà les amis, c’est incroyablement bon, c’est puissamment jouissif mais ce n’est qu’une demi-finale et on le sait très bien, toi et moi, que si le coton-tige gagne dimanche, ben on sera beaux caqueux sur notre canapé et que cette victoire de gala n’aura servi à rien. Enfin, à rien non, car une victoire contre l’homme qui a tué Roland Garros reste toujours un incommensurable bonheur. Les victoires contre Rafa, c’est comme les meufs que tu peux ramener dans ton pieu : ça reste des moments précieux dans une vie, sauf si tu t
’appelles Bastian Baker ou Tiger Woods

Bref, dimanche contre un Djokobite qu’on imagine déjà injouable et défensif au possible, qu’on imagine déjà sauver quatre balles de break par jeu et brandir le poing vers son clan (quelle horreur), il faudra évidemment un Rodgeur des grands jours, loin du Federer des trois dernières finales en Grand Chelem contre le Serbe. On n’a pas oublié les claques de Wimbledon 2014 et 2015 et celle de l’US Open de ce triste été 2015. Les trois fois, le Suisse avait fait des démonstrations en demi-finale ; les trois fois, il n’a pas su trouver la solution pour percer la muraille Djokochine. Ce sera identique dimanche et, sans vouloir jouer à l’oiseau de mauvais augure, j’ai peur. Très peur même.

Peur ou pas, mauvais souvenir ou pas, il s’agira de rentrer sur ce Central sans pression, sans complexe mais avec rage et conviction, le couteau entre les dents et avec l’ambition de faire rêver tout un pays et accessoirement des millions de fans à travers le monde. J
’ai bien dit des millions. Car la Terre entière, Serbie mise à part, sera derrière toi, ô grand Rodgeur, ô grand magicien. Fais-nous rêver, fais-nous bander, rien ne serait plus beau qu’un neuvième sacre au All England Club !!!

9.7.19

Wimbledon, tu as perdu ton âme

Comme souvent en Majeur, la première semaine n'a rien offert de croustillant. Bien sûr, il y a eu les éliminations surprises de Zverev, Tsitsipas, Thiem, Cilic et autre Anderson, mais pas de quoi faire bander un mort. Stan, lui, nous a fait sa traditionnelle trouée du mois de juillet à Church Road, là où il n'arrive désespérément pas à briller. L'homme qui a remporté l'Open d'Australie, Roland Garros et l'US Open (putain comme ça fait du bien de l'écrire) ne s'imposera probablement jamais à Wimbledon. Quoique, rien n'est impossible avec Stan, mais là ce serait quand même aussi improbable qu'une victoire d'un Français ou d'un mec de la NextGen en Grand Chelem, d'un titre d'une équipe romande en hockey ou football, ou d'un transfert réussi de Pablo Iglesias...

De leur côté, les trois grandissimes favoris n'ont pas tremblé jusqu'ici, ou si peu. Une petite frayeur pour Rodgeur au premier tour, une moyenne pour Popeye au deuxième et une minuscule pour Djokobite au troisième. Dommage que l'inénarrable Kyrgios n'ait pas chopé un set supplémentaire au taureau de Manacor, le combat aurait alors pu vraiment être dantesque et indécis. A ce sujet, qu'on soit bien clair les amis, que Musclor affronte cet abruti de Kyrgios, le petit-fils de Staline ou le neveu de Marc Dutroux, on sera toujours, j'ai bien dit toujours, pour l'adversaire de la crevette à l'ail. Que ce soit dit.

Bref, les trois monstres du circuit déroulent et leur démonstration respective en huitième de finale en dit long sur leur domination ou sur la faiblesse de l'adversité, c'est selon. 6-3 6-2 6-3 pour le coton-tige, 6-2 6-2 6-2 pour Terminator et 6-1 6-2 6-2 pour le Maître. Jetez tout ça à la poubelle, il n'y a rien à voir ! C'est tout de même fou de voir à quel point ces trois-là sont en dessus de la mêlée et à quel point aussi cette fameuse NextGen fait peine à voir, pour ne pas dire pire sur cette bande de bras cassés au mental de bisounours.

Comme tu vois, je ne suis pas de bonne. Et ce n'est pas ce qui suit qui va te rassurer sur ma joie de vivre en ce moment. Je l'ai dit dans mon dernier post, je le répète aujourd'hui en guise d'immense doigt d'honneur à ces putains d'organisateurs : vous êtes des nazes les gars, des gros nazes. Tous les observateurs et les joueurs l'ont relevé, le gazon du All England Club n'a jamais été aussi lent que cette année. Certains joueurs l'ont trouvé plus lent que la brique pilée de Roland Garros, d’autres ont même considéré le gazon de Wimbledon comme la surface la moins rapide du circuit !  

C'est une honte, une hérésie, un crime de lèse-majesté. Ce tournoi qui était jadis une ode à l'attaque, une invitation au service-volée, un paradis pour les attaquants n'est plus qu'une terre battue verte, un vulgaire champ de patates réservé aux crocodiles, un terrain de jeu où les montées au filet sont aussi rares que les scènes de tendresse dans les films de Rocco Siffredi. Messieurs les organisateurs, vous avez perdu votre âme, allez bien vous faire foutre ! Votre tournoi était magique, unique, mythique, il est en train de devenir de plus en plus infect. 

Allez, je vais me calmer, fumer une clope et penser à autre chose qu'à cette parodie de Wimbledon, cette escroquerie XXL. Et Dieu sait que je l'aimais ce tournoi, même si je n'y ai jamais brillé. Un Federer – Nadal se profile en demi-finale, je te promets que si ce match se solde par une victoire de Rambo après un combat à un mètre derrière la ligne de fond de court, je ne regarde plus de tennis jusqu'à l'US Open.

1.7.19

Décimhalle

(Oui, j'ai volé ce titre à Bruno de Seynod, merci à lui !) Désolé les copains, je me réveille de ma torpeur à l'instant, beau transpirant et beau collant. Il faut avouer qu'avec cette écrasante canicule, un truc aussi insupportable que les élucubrations de Gaël Monfils sur et en dehors du court, je n'avais qu'une envie : boire des piscines de rosé, rester au frais et ne rien faire, ce qui me convient finalement assez bien, je dois dire.

Ainsi donc, notre Rodgeur national a remporté son dixième tournoi de Halle et son 102ème titre ATP. On ne va pas parler d'exploit mais plutôt saluer – une fois de plus – l'incroyable longévité du plus grand joueur de tous les temps, qui se rapproche un peu plus du fameux record de Jimmy Connors. Autant être honnête avec toi, je n'ai pas beaucoup suivi le tournoi sponsorisé par Gerry Weber. Ce n'est donc pas ici que tu trouveras des considérations technico-tactiques sur le jeu du Maître sur herbe. Ce tournoi de Halle, c'est un peu comme les courses de ski alpin ou le curling aux JO : tu regardes seulement parce que tu sais qu'à la fin, c'est certainement un Suisse qui va gagner. Concernant Halle, c'est d'ailleurs un Suisse qui l'a gagné 10 fois sur les 17 dernières éditions. Impressionnant quand même.

Le Bâlois attaque donc les deux semaines les plus importantes de sa saison en pleine confiance et semble-t-il en parfaite condition. Celui qui vise un neuvième sacre à Church Road peut se targuer de bénéficier d'une partie de tableau abordable, avec une autoroute à cinq voies jusqu'à une éventuelle demi-finale contre Rafael Nadal qui, lui, va avancer en terrain miné et qui est au centre d'une mini polémique.

En effet, le joueur au budget coiffeur et cours d'anglais de zéro franc par année part avec l'étiquette de tête de série numéro 3, alors qu'il est numéro 2 mondial... Une polémique aussi intéressante que la Coupe du Monde féminine, on est d'accord. Les organisateurs de Wimbledon n'ont toujours fait qu'à leur tête, comme la décision de ne pas disputer de match le premier dimanche (une idée parfaitement débile, soit dit en passant), d'obliger les joueurs à porter du blanc et de modifier l'ordre des têtes de série, bref, on ne les changera pas aujourd'hui et c'est tant mieux. 

Par contre, et je tiens à le dire haut et fort, je regrette que lesdits organisateurs, pardon, que ces blaireaux d'organisateurs aient décidé de ralentir à ce point leur gazon. Eux qui étaient si ancrés à leurs traditions ont complètement craqué sur ce coup, et nul doute que des défenseurs comme Nadal, Djokobite ou autre Murray n'auraient pas gagné autant de fois le tournoi si la surface avait été aussi rapide qu'à mon époque... Ralentir la surface à ce point fut une immense connerie, comme celle d'instaurer un tie-break à 12-12 dans le cinquième set à partir de cette année. Les Britanniques étaient connus pour être fidèles à leurs traditions, ils me font penser aujourd'hui à des girouettes, voire à des petites bites !

Voilà les amis, comptez sur moi pour être au taquet durant cette quinzaine où les premières surprises sont déjà arrivées (au revoir Zverev et Tsitsipas, au lit la NextGen...), où nos Suisses ont tout pour bien faire (bien joué Stan et Golubic) et où l’on espère suivre des matches aussi dingues qu'en 2018, quoique non, avec cet affreux tie-break à 12-12, rien ne sera aussi fou qu'en 2018. Oui, c'était mieux avant. Et ça me fait bien chier de l'écrire concernant Wimbledon..